Déficit commercial: Comment nos exportations nous coûtent cher

Prédominance des produits primaires à faible valeur ajoutée, forte orientation vers la zone euro, faible diversification des partenaires, etc. Malgré l’envolée des cours, le pays reste soumis à un déficit permanent.

Jeudi 22 janvier 2015, une quarantaine d’experts et de cadres de l’administration publique se sont réunis à l’hôtel Mont Febe de Yaoundé. Ils ont discuté des cadrages généraux d’une stratégie nationale des exportations dont l’objectif fixé par le gouvernement est de « coordonner et d’harmoniser les différentes interventions publiques et privées devant concourir à l’équilibre de la balance commerciale ». Les résolutions issues de ces travaux n’ont pas été rendues publiques. Mais l’enjeu semble bien préoccuper les autorités camerounaises. Une étude diagnostique conduite par le panel évoqué ci-haut révèle en effet que les exportations du Cameroun sont traversées par plusieurs faiblesses qui finissent par plomber sa balance commerciale. Parmi les manifestations les plus visibles, le déficit commercial qui s’est accru d’année en année pour se porter en 2013 à 1350 milliards de Fcfa. « Une analyse de l’orientation géographique des échanges monte une prédominance des flux commerciaux du Cameroun avec la zone euro et une forte concentration des produits primaires », peut-on lire dans une note d’information du ministère de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat) consacrée à la situation du secteur des exportations. Ces deux écueils caractérisent autant qu’ils problématisent le secteur des exportations au Cameroun. En effet, 80% des recettes d’exportation du Cameroun proviennent de trois grands produits : pétrole, bois, banane. Autant dire sur des produits non transformés qui n’apportent donc pas de valeur ajoutée. De même, « en dehors de ces industries, le climat des affaires, peu favorable à l’attraction des investissements directs étrangers, parvient à saper même l’avantage potentiel conféré par les coûts salariaux qui restent bas», ajoute ladite note d’information. Petite suggestion d’experts : «la diversification et la promotion des exportations demeurent essentielles pour améliorer la balance commerciale du pays».

Solde extérieur

Mais comment y parvenir ? Car le diagnostic des experts indexe aussi une faible diversification des destinations et une faible valorisation des exportations. Ce qui n’est pas sans danger. En 2012 par exemple, le commerce extérieur du Cameroun a connu une baisse de 9,4% en moyenne des cours des principales matières exportées hors pétrole, induisant une dégradation des termes de l’échange. De même, le pays a perdu des parts de marché importantes dans la sous-région en ce qui concerne notamment le ciment. « Cela maintient la vulnérabilité de l’économie camerounaise face aux chocs extérieurs », notent encore les experts. « Le déficit de la balance commerciale étrangle le système. Il faut donc le rentabiliser afin redevienne efficacement productif », disait déjà l’économiste Dieudonné Essomba lors d’une conférence dédiée à la thématique de l’endettement. Un motif de satisfaction réside déjà dans la balance commerciale avec l’Union Européenne (Ue) qui est restée excédentaire en 2012. Alors que le pays a ratifié en juillet 2014 les Accords de partenariat économique (Ape), la nécessité d’une rationalisation de ses exportations se pose de plus en plus. « Les statistiques du commerce extérieur hors pétrole montrent que les échanges avec l’étranger ont considérablement réduit le déficit extérieur national en 2012. Ce déficit s’est contracté d’environ 70% en fin d’exercice 2012. En se situant à 430,5 milliards de Fcfa, le solde extérieur hors pétrole est à son niveau le plus bas depuis 2004 », disent les experts du Minepat. L’autre piste sur laquelle ils semblent se concentrer est le développement de nouvelles destinations dont l’Asie et principalement la Chine, l’Afrique du sud, les pays du Maghreb et du Moyen-Orient, mais surtout le Nigéria, passé depuis l’année dernière au premier rang des économies africaines.

Serge-Lionel Nnanga

Retour à l'accueil